Jean-Noël Aletti, «Romains 4 et Genèse 17. Quelle énigme et quelle solution?», Vol. 84 (2003) 305-325
The article is an attempt to show that, thanks to the two citations of Gn 15,6 and Ps 31[32],1-2 in Rm 4,2.7-8, Paul gives his opinion indirectly but nevertheless clearly on the injunctions of Gen 17,10-14. Those citations form a gezerah shawah (= GS), which goes along with the standards of the technique fixed by the rabbis later on and allows Paul to interpret the role of the circumcision in Gn 17,10-14 originally and paradoxically.
péchés. Car, la Loi indique bien comment se disposer au pardon. Certes, les procédures de blanchiment n’ôtent pas à la justification sa gratuité, mais c’est en les observant que le sujet de la Loi signifie sa volonté de recevoir le pardon et d’en vivre. Paul a-t-il donc vraiment montré que les injonctions de Gn 17,10-14 ne pouvaient valoir pour les ethnico-chrétiens, qui n’avaient pas à devenir juifs pour obtenir la justification?
IV. Rm 4 et Gn 17,10-14
Si la GS de Rm 4,3.7-8 a montré les correspondances entre les deux textes scripturaires, en particulier comment Gn 15,6 peut, doit même être interprété grâce au Ps 31 [32], la réciproque est également vraie. Comme le montre le tableau des correspondances existant entre les deux passages, le pécheur qui ne peut se prévaloir de ses œuvres pour être justifié est dans la même situation que l’incirconcis: la circoncision ne lui sert à rien, puisque seule la miséricorde peut le guérir de son péché et lui donner d’avoir une juste relation à Dieu et aux autres — la GS de Rm 4 donne ainsi une assise biblique supplémentaire aux énoncés de Rm 2,25-29. Mais si la circoncision physique n’est d’aucune aide pour la justification du juif pécheur, c’est que, pour être obtenue, la justification n’est pas nécessairement liée à la circoncision. Comme Abraham, il faut croire pour l’obtenir, et l’on voit alors pourquoi Gn 15,6 est typique de la situation des ethnico-chrétiens, qui, n’étant pas circoncis, ont cru en la parole de l’Évangile et ont obtenu par leur seule foi en cette parole le pardon de leurs fautes et la justification. Comme l’ont souligné Cranford39 et d’autres, ce n’est pas l’acte de foi du patriarche qui est de soi typique, mais l’ensemble des données qui constituent la situation dans laquelle il se trouvait alors (son statut d’incirconcis, l’absence d’œuvres, sa foi, etc.) et qui est celle-là même des non juifs adhérant à l’Évangile.
Les injonctions de Gn 17,10-14 ne sont pas mentionnées en Rm 4, et l’on pourrait croire que Paul n’a pas osé affronter de face la question. Nous venons cependant de voir que la GS y répond de façon indirecte mais décisive. Car, si le sujet de la Loi tombé dans le péché se retrouve dans une situation identique à celle de l’incirconcis et doit s’en remettre à la seule miséricorde divine pour retrouver la justice, c’est que la circoncision n’est pas nécessaire pour son obtention.