Maurice Gilbert, «Où en sont les études sur le Siracide?», Vol. 92 (2011) 161-181
This article takes stock of works published over the last twenty years on the book of Sirach. In it the textual, literary and theological problems dealt with these days are discussed in succession. The footnotes provide an ample bibliography on the subject. The conclusion is that research on this book is making great strides, but also that it is far from having solved all these problems.
Où en sont les études sur le Siracide?
Lors des Journées Bibliques de Louvain en 1972, une discussion
publique s’engagea entre H.D. Preuss et J. Lévêque sur la conclu-
sion du courant sapientiel de l’Ancien Testament. Pour Preuss, qui
s’en tenait à la Bible hébraïque, la sagesse biblique s’achevait
avec Qohélet sur un échec et mat! Position extrême à laquelle
s’opposa Lévêque, car, si l’on exclut le Siracide et la Sagesse de
Salomon, comment expliquer la résurgence de ce courant sapien-
tiel dans le Nouveau Testament, en particulier dans les Évangiles
synoptiques ? 1
Depuis un peu plus de vingt ans, longtemps après ce colloque
de Louvain, la découverte de textes sapientiaux dans les manuscrits
de Qumrân conduisait à refuser la thèse de Preuss: en Israël, le
courant sapientiel ne s’était donc pas achevé sur un échec et mat 2.
Quant à la Sagesse du Siracide, elle est bien juive elle aussi, mais,
à la différence des textes qumrâniens, elle a traversé les siècles.
On pourrait, certes, penser que cette œuvre attribuée à Ben
Sira aura déjà dévoilé tous ses secrets. Il n’en est rien. Jusqu’en
18 9 6 , les commentateurs allaient tranquillement leur petit
bonhomme de chemin. Ils expliquaient la version grecque la plus
courante, celle des grands manuscrits onciaux, réalisée, selon le
Prologue classique du livre, par le petit-fils de l’auteur; cependant
rares étaient les commentaires vraiment scientifiques, le meilleur
étant celui de O.F. Fritzsche de 1859 3. Dans le monde occidental,
on utilisait la version latine sixto-clémentine de la Vulgate et le
livre s’appelait l’Ecclésiastique. En 1873, A.M. Ceriani avait édité
la version syro-hexaplaire du Siracide et en 1884 la version
syriaque Peshitta 4. On savait pourtant que l’auteur original, Ben
Cf. M. GILBERT, “Journées bibliques de Louvain (23-25 août 1972â€,
1
RTL 3 (1972) 496-500, spéc. 499-500.
Cf. M.J. GOFF, Discerning Wisdom. The Sapiential Literature of the
2
Dead Sea Scrolls (VTS 116; Leiden – Boston 2007).
O.F. FRITZSCHE, Die Weisheit Jesus-Sirach’s (Kurtzgefasstes exege-
3
tisches Handbuch zu den Apokryphen 5; Leipzig 1859) XL-415 p.
A.M. CERIANI (ed.), Codex Syro-Hexaplaris Ambrosianus photolitho-
4