Christian-B. Amphoux, «La grande lacune du Codex de Bèze.», Vol. 17 (2004) 3-26
One of the most important NT manuscripts, the codex Bezae, included between the Gospels and the Book of Acts several writings that are nowadays
lost. The present article corrects the author’s former views, published in 1996, concerning the contents of this lacuna: the 66 missing pages may very well have included a seven letters corpus, in fact a forerunner of the Catholic Epistles corpus, including Hb but not yet Jd. The analysis of these letters allows us both to understand better the period of redaction of NT writings and to bring this enterprise in connection with the writing process of the Old Testament.
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à Marcion. Elle entre dans le corpus en s’associant à 1 Pierre, en raison
de la proximité des noms d’auteur; et sa longueur est de 7 pages, au lieu
de 11 pour Ephésiens; soit un nouveau total de 65 pages, qui correspond
mieux à la longueur de la lacune du Codex de Bèze. Dans la nouvelle
collection, Hébreux occupe une position centrale entre deux groupes de
trois lettres dont le premier a au total une longueur double du second;
puis Hébreux quittera ce corpus pour entrer dans celui de Paul, et sera
remplacée par Jude, qui prendra place en position finale. On peut donc
résumer l’évolution de cette collection de lettres en trois étapes:
(1) Jacques – 1 Pierre – Hébreux – 1 Jean – Ephésiens
(2) Jacques – 1-2 Pierre – Hébreux – 1-3 Jean
(3) Jacques – 1-2 Pierre – 1-3 Jean - Jude
La collection de lettres qui remplit la grande lacune du Codex de Bèze
serait, en somme, un stade intermédiaire entre la collection primitive de
cinq lettres d’accompagnement et la collection définitive dite des épîtres
catholiques.
La présente hypothèse suggère en même temps une modification de
la théorie des deux sources: il y aurait au départ non pas deux, mais
trois sources distinctes, donnant naissance à cinq écrits principaux, tous
diffusés avec une lettre qui se trouve encore dans le Nouveau Testament.
Et cela n’est pas tout: lors de la constitution des corpus qui vont donner
naissance au Nouveau Testament, les éditeurs ont recours à une règle de
proportion du simple au double qui semble aujourd’hui perdue de vue, mais
qui s’observe aussi dans l’agencement des livres de l’Ancien Testament et
qui opère ainsi une continuité rhétorique entre les deux testaments.
3. Le lien entre les deux testaments
Il existe, dans la rhétorique biblique, une règle de proportion qui a
une grande constance et qui, cependant, ne se trouve décrite nulle part:
nous l’appelons la proportion du simple au double. Elle consiste à réunir
des éléments en deux groupes liés par cette proportion et à placer à leur
jonction un élément central.
Cette structure s’observe d’abord dans des épisodes législatifs: (1) le
Décalogue (3 interdits pour la relation à Dieu, 1 central pour le sabbat
et 6 pour les relations interhumaines); (2) la loi noachique26 (1 interdit
pour la relation à Dieu [idolâtrie] et 2 pour les relations interhumaines
[meurtre et adultère]).
C.-B. Amphoux, “Les variantes et l’histoire du décret apostolique (Ac 15,20.29;
26
21,25)â€, dans A. Denaux (ed.), NT Textual Criticism and Exegesis. Mélanges offerts à J.
Delobel (Leuven 2002) 209-26.