Innocent Himbaza, «Dt 32,8, une correction tardive des scribes. Essai d’interprétation et de datation», Vol. 83 (2002) 527-548
In an article written forty years ago, Dominique Barthélemy bound together two supposed scribal corrections introduced in the second Century BCE: the correction of the number of the Israelites who went down to Egypt (Gen 46,27; Exod 1,5), and the correction of the "Children of God" becoming "Children of Israel" in Deut 32:8. This article proposes to separate the two supposed corrections. Considering the historical evolution of the theological interpretations the author argues that the correction of Deut 32,8 was introduced in the first Century CE only, when the interpretation of the "Children of God" was limited to the human sphere.
En 1962, Dominique Barthélemy eut le mérite de mettre en évidence une correction des scribes (un tiqqûn sopherim) non transmise par la tradition rabbinique. Il s’agit de la leçon "fils d’Israël" que nous avons en Dt 32,8. Avec l’appui des découvertes des mss de la Mer Morte, Barthélemy a démontré que la leçon ancienne était "fils de Dieu" comme certains le soupçonnaient déjà1. Sa contribution fut publiée en 1963 dans le volume 9 des Suppléments au Vetus Testamentum2. L’identification de cette correction des scribes n’a pas suscité d’objections et elle fait maintenant partie des tiqqûné sopherim identifiés3. D’ailleurs, actuellement certains n’hésitent pas à revenir à l’ancienne lecture, lorsqu’ils traitent de ce verset4.
Pour situer cette correction dans l’histoire, Barthélemy fait un parallélisme avec les 70 dieux, fils d’Ashérah, dans le panthéon d’Ugarit, qui ont chacun un pays en héritage. Il signale que ce chiffre motive l’énumération des descendants de Sem, Cham et Japhet en Gn 10. Or laisser l’expression "fils de Dieu" en Dt 32,8 risquerait, soit d’identifier YHWH à un des fils de Dieu, soit d’excuser le polythéisme parmi les nations. Barthélemy dit qu’on changea "bené Elohim" en "bené Israël" afin de "trouver une autre base pour justifier le chiffre connu des 70 peuples en lesquels Dieu divisa l’humanité après le déluge"5. Barthélemy signale le rapprochement que la tradition juive fait entre les 70 peuples et les 70 âmes des fils d’Israël qui sont