Paul Beauchamp, «Lecture christique de l’Ancien Testament», Vol. 81 (2000) 105-115
Attempting a Christ-oriented reading of the Old Testament is a challenge which invites objections and obstacles. What is the degree of legitimacy or of necessity which the New Testament (the Gospels and Acts) provides for such a reading? We are concerned with those texts which set forth the principle itself rather than with individual citations; such a reading appears as inseparable from the foundations of the faith. Other texts are illuminating for us with regard to the way of carrying this out. This article presents the first lines of a response, by means of a hermeneutical conversion. It presupposes that one cannot distance oneself from the literal meaning and from its spiritual and theological content.
loublie souvent: un prophète dont la mission est vouée à un échec si radical quil est annoncé dès son appel (Is 6,9-10), ne saurait être voué à une fin heureuse! Dans lidentification entre le prophète appelé en Is 6 et celui dont la fin est décrite en Is 53, tout est naturel, excepté le fait que les deux textes soient attribués au même auteur, doù la question pertinente posée en Ac 8,34: le prophète parle-t-il "de lui-même ou de quelquun dautre?" Le même condamné atteindra les Nations (Mt 12, 18-21 citant Is 42,1-4). Effacement jusquà lextrême, Passion, et ouverture aux Nations se trouvent discrètement connectés par le choix de Matthieu.
Dans Marc, un seul événement accomplit (globalement) "les Écritures", mais cest lui-même un événement totalisant: Jésus se démet de sa liberté (Mc 14,49). Tout Jésus est dans loffrande libre et obéissante de son corps, et tout cet acte est dans toutes les Écritures.
Luc étend la référence aux Écritures à tous les traits principaux de lévénement christique, y compris le don de lEsprit Saint et la prédication de lÉvangile aux Nations (Lc 24,44).
Dans Jean, le "afin que" se concentre sur le moment de la croix (Jn 13,18; 15,25; 17,12; 19,28.30.36)
Nous désignons ainsi certains textes qui, sans le verbe "accomplir", posent une relation particulière, en quelque sorte immédiate, entre un personnage, un auteur, toutes les Écritures, et la personne vivante, singulière, de Jésus lui-même. Nous sommes alors, pour le contenu et pour la forme, devant un autre schéma, qui nest plus narratif, mais transhistorique, ontologique. Ainsi trouvons-nous, dans la bouche de Jésus: "[Moïse] a écrit de moi" (Jn 5,46; cf. 8,56: "Abraham a vu mon jour"); dans celle de Philippe: Jn 1,45: "Celui dont il est parlé dans la Loi et les Prophètes, nous lavons trouvé, cest lui"; de lévangéliste enfin: Jn 12,16.41.
Véhiculé par la prédication apostolique, il est conforme aux Écritures: Paul prétend avoir toujours enseigné "sans jamais dire rien en dehors de ce que les prophètes et Moïse avaient déclaré devoir arriver" (passion, résurrection, annonce au peuple et aux païens) (Ac 26,23). On observera que cette allégation (à vrai dire, combien inattendue!) figure dans la dernière allocution de Paul. Or celle-ci est, en style direct, un sommaire des allocutions précédentes. Cette fonction est redoublée du fait que son thème reprend, en finale des Actes, la leçon dEmmaüs, qui est elle-même un sommaire fait par Jésus de ses propres annonces, en finale de lÉvangile.
2. Quelles Écritures sont accomplies par la vie de Jésus?
Nous nous intéresserons surtout aux formules totalisantes, déjà présentes dans Mt 5,17 ("accomplir Loi et prophètes") et 26,54.56, ainsi quen Mc 14,49. En Luc et Jean, les formules totalisantes sont plus particulièrement favorisées: les Écritures (Mt 26,54; Mc 14,49), toutes les Écritures (Lc 21,22; cf. Ac 13,29), la Loi et les Prophètes (Mt 5,17; Lc 24,44; Jn 1,45), Moïse (Jn 5,46), les Prophètes (Ac 3,18 "tous"; 13,27). On échappe ici, plus facilement encore que par le moyen de citations interconnectées, aux contestations appelées par les références à des textes ponctuels, qui nous paraissent souvent fragiles. Nous reviendrons sur limportance et la fécondité des perspectives ainsi ouvertes.