Jean-Noël Aletti, «Galates 1–2. Quelle fonction et quelle démonstration?», Vol. 86 (2005) 305-323
This article is an attempt to show the following: (1) Galatians 1,11–2,21 is a
unified argument in which vv. 11-12 constitute the propositio; (2) Gal 2,14b-21
represent a short speech bringing the argument to its climax, and (3) Gal 2,16
takes up the Jerusalem agreement about Paul’s Gospel and not only fulfills a
rhetorical function within the short speech of v. 14b-21 but also provides the
thesis of the argument that unfolds in Galatians 3–4.
Galates 1–2 Quelle fonction et quelle démonstration? 315
trois ans plus tard, il n’y est resté que quinze jours, il n’a habité que
chez Pierre et n’a vu personne d’autre, excepté Jacques. La visite est
manifestement présentée comme privée: Paul a voulu connaître
Pierre (38), le seul chez qui il a logé là -bas. Il n’y est donc pas allé pour
recevoir une approbation officielle de son Évangile. Cette dernière ne
lui sera donnée que lors de la visite suivante, bien plus tard. Bref, en
Ga 1,13-24, tout ce qui souligne la distance dans l’espace et le temps,
a pour fonction de montrer que l’Évangile de Paul ne vient pas des
hommes.
Les preuves jusqu’à présent fournies ont illustré la partie négative
de la propositio (ou, mieux, de la ratio qui se trouve en 1,12a), Ã savoir
que l’Évangile de Paul ne vient pas des hommes. Elles ne suffisent
évidemment pas, surtout si ce dernier est le seul à déclarer que son
Évangile n’est pas d’origine humaine. Les apôtres de la première heure
auraient pu en effet lui objecter que, pour le reconnaître tel, ils devaient
auparavant l’entendre. Et Paul lui-même sentit la nécessité d’une telle
reconnaissance ecclésiale, puisqu’il dit en 2,2: «J’exposai l’Évangile
que j’annonce (39) parmi les Nations…, pour ne pas courir ou avoir
couru en vain». Par esprit d’union et comme confirmation, il a lui-
même voulu cette reconnaissance par les autorités compétentes en
matière de prédication et d’enseignement de l’Évangile (40). Ga 2,1-10
rend compte de ce tournant: les autorités de Jérusalem ont déclaré
officiellement et sans réticence aucune que Dieu avait confié à Paul
l’évangélisation des Nations (41). S’il n’est pas question de commenter
ici l’épisode en toutes ses finesses, il importe néanmoins de noter que
(38) Le syntagme iJstorh'sai Khfa'n peut être traduit «pour chercher Ã
connaître Pierre», ou encore «pour interroger Pierre». Sur ce verbe, voir les
commentaires, en particulier VANHOYE, Galati, 49, et BUSCEMI, Galati, 129-130,
qui insistent, avec d’autres, sur le fait qu’étant donné le contexte (et surtout la
propositio de 1,11-12), l’expression ne peut connoter une demande de catéchèse.
Pierre a sans doute dû parler du Jésus qu’il a suivi, aimé, renié, et rencontré
ressuscité, bref il a dû narrer son expérience; en ne disant rien sur les informations
qu’il a alors reçues, Paul laisse entendre qu’elles n’ont pas modifié le paysage
christologique ou sotériologique de son Évangile.
(39) Avec le présent khruvssw Paul veut signifier qu’il annonce toujours le
même Évangile, depuis qu’il lui fut révélé. Voir VANHOYE, Galati, 55.
(40) Position analogue de TOLMIE, Persuading the Galatians, 69-83.
(41) Voir Ga 2,7-8, avec pepivsteumai, qui est évidemment un passif
théologique, comme l’admettent les commentaires, puis avec une ellipse, encore
théologique: «Celui qui avait agi en Pierre pour l’apostolat des circoncis avait
aussi agi en moi en faveur des païens» (trad. TOB).