Robert Hermans, «La christologie d’Ephésiens.», Vol. 92 (2011) 411-426
This essay proposes to read Eph 1,23, as follows: the plh/rwma is Christ, the fullness of all God’s graces. And the participle plhroume/nou is a neuter passive, whose content is the actual blessing brought by God to its fullness in all the believers. Eph 1,23 can then be translated like this: «Christ is the fullness of what is fully accomplished in all the faithful».
Biblica_2:Layout 1 21-11-2011 13:02 Pagina 414
414 ROBERT HERMANS
1. L’interprétation du participe plhroume,nou
Telles sont les questions auxquelles il nous faut répondre: le participe
a-t-il un sens actif ou passif? Et, à supposer qu’il soit passif, quel en est
le sujet? Enfin, de quelle réalité spirituelle s’agit-il?
a. Le sens du participe
On a déjà beaucoup écrit sur ce problème purement linguistique. Ces
derniers temps, la plupart des auteurs ont interprété ce participe comme
un actif et traduisent ainsi: “Dieu a donné le Christ à l’Eglise, qui est le
corps du Christ, qui est la plénitude de Celui qui accomplit tout en tousâ€.
Bien que cette interprétation soit actuellement acceptée par la majo-
rité, il existe plusieurs objections à son encontre.
Premièrement: à l’époque des premiers chrétiens ce participe était gé-
néralement considéré comme un passif. Comme ils étaient plus proches
du langage biblique, on peut admettre qu’ils comprenaient mieux que
nous l’emploi de cette forme.
Deuxièmement: d’après l’usage linguistique grec général il est presqu’im-
possible de donner à ce participe un sens actif 5.
Troisièmement, et ce me semble être une preuve décisive: tous les
verbes, de Ep 1,3 à 2,10 décrivent l’agir salvifique de Dieu le Père et sont
tous à l’actif. Partout (ici aussi) c’est le Père qui dirige l’action salvifique.
Si le participe plhroume,nou avait un sens actif, le Christ reprendrait le rôle
actif de l’action salvifique de Dieu, et cela à l’improviste, sans introduction
et sans autres considérations. Aucun écrivain digne de ce nom ne changerait
ainsi le sujet dans un raisonnement de cette importance.
Ces trois objections rendent l’interprétation passive de ce participe la
plus acceptable 6.
5
Ce participe ne peut avoir un sens actif. Il ne peut être une forme médiale,
pour la raison suivante: quand un verbe transitif est normalement employé Ã
l’actif, il peut être utilisé, tout aussi normalement au passif, mais pas à la forme
médiale. Le P. I. de la Potterie (“Le Christ plérôme de l’Église†[Ep 1,22-23],
Bib 58 [1977] 500-524) a examiné l’utilisation du verbe plhrou/n dans les textes
grecs profanes. La forme médiale de ce verbe ne figure en effet qu’à l’aoriste,
où on peut constater une différence notable avec la forme passive, mais alors
uniquement dans un contexte précis, notamment dans l’expression “charger des
bateauxâ€. Aussi bien dans la Septante que dans le NT on trouve très souvent la
forme passive de plhrou/n, mais nulle part la médiale. Le participe présent passif
figure deux fois dans le NT: dans Lc 2,40 et dans notre texte Ep 1,23. Si on
prenait ce participe comme une forme médiale, ce serait un cas absolument
isolé. En Ep on trouve quand même deux fois la forme médiale du verbe poi,ein.
Ce verbe accepte plus facilement cette forme, pour le sens.
6
On pourrait éventuellement signaler la très forte forme active du verbe